Revirement de l’assurance décennale en matière de travaux sur existants

Depuis la mise en place de l’assurance décennale par la loi du 4 janvier 1978, l’ajout d’un élément d’équipement dissociable sur un ouvrage existant ne mettait pas en jeu la garantie décennale que si cet élément d’équipement était lui-même constitutif d’un ouvrage. Il devra aussi avoir fait l’objet de travaux d’adaptation qui relevaient de techniques de construction. L’arrêt rendu le 15 juin dernier par la 3e chambre civile apporte un revirement de jurisprudence en matière de garantie décennale. Dans l’espèce, une affaire sur la pose d’une pompe à chaleur air-eau dans un immeuble existant a été portée devant la Haute juridiction, mais la Cour d’appel de Douai a refusé la mise en jeu de la garantie décennale en s’appuyant sur le constat de l’expert judiciaire. L’expertise de ce dernier avait démontré que quelques percements ont suffi lors pour installer cet élément d’équipement. Les percements étaient nécessaires pour la pose de la tuyauterie. Et la pompe à chaleur n’était pas intégrée au logement. Pour pouvoir bénéficier de la garantie décennale, le recours du propriétaire à l’encontre de la société à qui l’installation de la PAC a été confiée se basait sur les conditions de qualification d’un ouvrage et l’intégration de l’installation de l’élément d’équipement sur existant à un ouvrage, et l’impropriété à destination de l’ouvrage. Les dommages rendaient effectivement l’ouvrage impropre à sa destination, car il était privé d’eau chaude et de chauffage. Au lieu de rejeter le recours du propriétaire étant donné que les deux arguments étaient conformes à l’ancienne jurisprudence, la Cour de cassation a tranché en faveur du propriétaire pour violation de l’article 1792 du Code civil en rappelant que les désordres qui affectent les éléments d’équipement, qu’ils soient dissociables ou non, d’origine ou installés sur existant, doivent relever de la responsabilité décennale de l’installateur lorsque les dommages constatés rendent l’ouvrage impropre à sa destination.

Quid des assurances obligatoires

La majorité des entrepreneurs qui effectuent des travaux sur existant doivent être couverts par une assurance décennale. La non-souscription de cette assurance pourrait donc présenter des risques pour l’entreprise. De son côté, le maître d’ouvrage doit aussi savoir qu’il reste débiteur de cette garantie en cas de revente du logement avant l’expiration du délai décennal. Lui aussi doit donc exiger une justification de la souscription de l’entrepreneur pour que le futur acheteur de son bien puisse bénéficier de la garantie décennale en cas de dommages qui pourraient compromettre la solidité de l’ouvrage ou le rendre impropre à sa destination. Et l’assurance dommage-ouvrage n’est que le résultat de l’applicabilité de la responsabilité décennale. Mais il faut croire que la mise en jeu de l’assurance dommage-ouvrage en espèce n’est pas appropriée. La responsabilité de l’entrepreneur ne devrait pas jouer sur une simple installation de PAC ou d’autres éléments d’équipement dissociables sur existant. Ce nouvel arrêt de la Cour de cassation change la jurisprudence traditionnelle en affirmant que l’installation d’une pompe à chaleur, élément d’équipement dissociable, relève de la garantie décennale même s’il ne constitue pas un ouvrage.

octobre 9, 2017